Maniérisme (art) , catégorie historiographique désignant certaines productions artistiques réalisées entre 1520 et la fin du XVIe siècle.
Le maniérisme désigne un art qui chercha à définir son autonomie, à se détacher de la réalité première en mettant en relief l'Idée de l'artiste, à transposer dans la matière le concept artistique. C'est un art dédié à la connaissance du sujet plutôt que celle de l'objet. Son itinéraire se situe en permanente oscillation entre les deux idéaux antagonistes de l'art classique : Raphaël et Michel-Ange. Le maniérisme s'est développé dans une période moralement éprouvée par une profonde crise de la conscience religieuse. Les querelles de la réforme de l'église nécessitèrent la réaffirmation de l'évidence formelle du dogme et de ses fondements rationnel et historique. Ainsi, le répertoire antique, considéré à la Renaissance comme historiquement fondateur du phénomène artistique, devient une source de modèles formels et abstraits utilisés dans le but de fixer une règle mais aussi d'y déroger.
Le maniérisme apparut d'abord dans les milieux florentins vers 1520. Andrea del Sarto déplaça la fonction narrative de l'œuvre et chercha à définir un concept de beauté non plus idéale mais suggestive et évolutive. Pontormo, la figure la plus célèbre du maniérisme toscan, élabora une valeur idéale de l'art en soi et non pas de l'art en tant que reflet d'un élément extérieur comme la nature. Rosso Fiorentino, qui vint en France dans les années 1530 pour collaborer à la décoration du château de Fontainebleau, tenta dans ses premières œuvres de recomposer l'espace en fonction de nouveaux critères géométriques et volumétriques. Jules Romain, un élève de Raphaël qui passa une grande partie de sa carrière à Mantoue au service des Gonzague, fonda ses recherches sur la négation des catégories techniques des différents médias qui, selon lui, étouffaient la création.
Une période de stabilisation et de diffusion suivit. Agnolo Bronzino, collaborateur de Pontormo, portraitiste officiel de la cour des Médicis, mettait en évidence la portée sociale de ses modèles. Mais c'est Giorgio Vasari qui permit de cristalliser toutes les préoccupations artistiques de cette époque. Il fut peintre du grand duc de Toscane, premier historien de l'art, chef du plus important atelier de peinture italien du milieu du siècle, fondateur de la première Académie des beaux-arts (appelée l'Accademia del Disegno).
L'art issu du maniérisme se diffusa également hors d'Italie. En France, l'école de Fontainebleau est associée dans sa première période aux figures du Primatice et de Nicolò dell'Abate. On vit alors l'émergence d'artistes comme François Clouet, mais la plupart des œuvres françaises de cette époque restent anonymes. En Espagne et dans les Flandres, c'est sous Philippe II que cette peinture prit une place importante grâce notamment aux artistes Vicente Macip ou Luis de Morales. Vers la fin du siècle, des artistes italiens poursuivirent l'entreprise de diffusion à travers le chantier de l'Escurial. Il s'agit de Luca Cambiaso mais surtout de Federico Zuccari et Pellegrino Tibaldi. Les Provinces-Unies (partie septentrionale des Pays-Bas) connurent la peinture exceptionnelle de Lucas de Leyde. En Bohême, la cour de Prague autour de Rodolphe II permit aux artistes comme Bartholomeus Spranger ou Roelandt Savery de développer un centre de production significatif.
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